Je progresse

5 techniques pour vaincre un blocage d’écriture

Ces derniers mois, j’ai été confrontée au pire cauchemar de l’écrivain.e : le syndrome de la page blanche. Oui, Halloween s’approche, il est l’heure de sortir les histoires d’horreur^^.

Il est sûrement un peu tôt pour jurer que j’en suis sortie, malgré tout, je peux partager quelques « trucs » qui m’ont aidée ces derniers mois, ou pendant l’écriture de mon premier roman (et celui-là je l’ai fini^^).

Je le répète souvent dans mes articles, je ne prétends pas être une experte, ni avoir la solution miracle à tous vos blocages. Je peux seulement vous partager ce qui a pu marcher pour moi, basé sur ma propre expérience.

Voici donc 5 façons de combattre le terrifiant syndrome de la page blanche, bouhouhou…

1 : Passer à la suite

Alors oui, directement, je vous propose d’abandonner. Après tout, la fuite est un mécanisme de défense comme un autre. Mais vous devez vous en douter, je ne vais pas vous conseiller d’abandonner l’écriture et de vous reconvertir dans la fabrication de masques au crochet (de toute manière, rien ne vous empêche de faire les deux^^).

Non, la première technique, que j’ai utilisée très régulièrement au cours de l’écriture de mon premier roman, consiste simplement à sauter une scène sur laquelle vous bloquez. Pour certaines personnes, cela fait naturellement partie de leur processus : tout le monde n’écrit pas forcément dans l’ordre chronologique (ça peut d’ailleurs être une raison de bloquer, si vous vous forcez à écrire chronologiquement alors que ce n’est pas la méthode qui vous convient le mieux). Dans mon cas, je n’ai pas fait de plan pour mon premier roman, et j’avais donc besoin d’écrire l’histoire dans l’ordre pour découvrir comment elle allait se dérouler. Pourtant, à force de blocage, j’ai été obligée de laisser de côté quelques scènes, que je n’ai écrites que dans un deuxième ou troisième jet… A ce moment-là je n’étais simplement pas prête à les écrire, et je ne regrette pas de m’être autorisée à les laisser de côté.

Une petite précision : même si je n’ai pas écrit ces scènes, je savais tout de même globalement ce qui allait s’y passer, ou en tout cas leur rôle dans l’histoire. Si vous n’arrivez vraiment plus à avancer, mais que vous mourrez d’envie d’écrire la suite, ne vous cassez pas la tête et laissez la scène scélérate de côté. Au moins si c’est un premier jet…

2 : Éclaircir la situation : recherches et planification

Le problème avec ma précédente suggestion, c’est qu’il s’agit d’une solution à court terme (souvent pour pouvoir finir un premier jet). Seulement, cette scène qui coince, il faut bien l’écrire un jour…

J’ai rencontré ce problème à plusieurs reprises, avec différents niveaux d’intensité. J’ai par exemple eu quelques difficultés à écrire une scène de vente aux enchères, jusqu’à ce que je fasse des recherches qui me permettent de visualiser moi-même les lieux, le déroulement, etc.

J’ai eu le même problème, mais encore amplifié sur des scènes très particulières de mon intrigue. Le pitch de La Muse aphone, c’est un psychiatre qui rencontre une nouvelle patiente mutique et qui soupçonne qu’elle a été témoin d’un meurtre. Plusieurs de mes scènes impliquent donc le travail d’un psychiatre avec une patiente, avec une triple difficulté : mon héros écrit une thèse sur l’utilisation du jeu vidéo en psychiatrie, ce qui existe mais n’est pas très répandu dans la vraie vie, la patiente ne parle pas du tout, ce qui limite drastiquement les échanges entre les personnages, et je n’ai moi-même aucune formation en psychiatrie ou psychothérapie…

J’ai gardé ces scènes pour la fin et je me suis autorisée à ne pas chercher à aligner les mots à tout prix (l’avantage de ne pas se fixer d’objectif en nombre de mots, mais plutôt en heure de travail) et à prendre le temps de faire des recherches plus poussées sur le sujet. J’avais bien sûr fait des recherches sur le fonctionnement général d’un service psychiatrique dans un hôpital, sur les entretiens cliniques, les différentes pathologies dont je parlais, etc, mais parfois il peut être nécessaire de creuser un sujet plus en détail en cours de route. Ça peu paraitre inefficace (et ardu !) de passer une dizaine d’heures à lire des articles scientifiques plus ou moins en rapport avec le sujet, souvent très techniques et en anglais, mais je ne l’ai pas regretté. Même si on sait exactement ce qu’on veut voir se passer dans une scène, parfois on a besoin de bases plus concrètes pour être capable de l’écrire.

Dans mon cas, cela a souvent pris la forme d’articles scientifiques, mais ça peut aussi être un petit tour sur Google images pour visualiser des lieux ou sur des forums ou blogs où des gens partagent l’expérience de leurs métiers ou hobbies, ou si ça ne vous fait pas peur, des interviews avec des vrais gens ! (oui on reste sur le thème d’Halloween, parler à des gens, quel cauchemar^^). La solution, en dehors de recherches documentaires peut simplement être de planifier ce qui doit se passer dans la scène (surtout si vous penchez plutôt côté Architecte). Dans tous les cas l’idée est la même : vous pouvez bloquer parce que vous n’avez pas assez d’information sur ce qui doit se passer. 

Prendre le temps de clarifier tout ça peut faire des miracles. Même si ça veut dire se brûler les yeux sur des articles scientifiques incompréhensibles, oui oui^^.

3 : Faire une pause

Dans mon premier point, je vous parlais de sauter une scène ou un passage. Dans celui-ci, je vais être encore plus radicale : parfois, on a besoin de faire une pause.

Il ne s’agit pas forcément d’arrêter d’écrire. Début 2019, je n’avançais plus sur mon roman. Une semaine de vacances début mars a réglé le problème. Comme tous les ans, j’étais simplement crevée à la fin de l’hiver, en plus d’être trop stressée par le travail. Une bonne semaine de vacances a suffit pour faire des merveilles et j’avais écrit un article à ce sujet à l’époque. J’ai eu le même problème début 2020, mais multiplié par 100 : fatigue de fin d’hiver, période de stress professionnel qui durait depuis plus d’un an, avec par-dessus mon premier achat d’appartement et le déménagement qui va avec. Mais cette fois, les vacances n’ont pas suffit. J’ai dû m’arrêter d’écrire quelques temps, tout simplement parce que contrairement à ce qu’on se dit toujours, on ne peut pas tout faire à la fois^^.

« Prendre des vacances » n’est pas toujours une option, et contrairement à ce qu’on dit souvent, parfois on n’a vraiment « pas le temps » : quand on s’occupe d’un nouveau-né ou d’un parent malade, quand on doit passer un concours, ou déménager, etc.

Bien sûr tout le monde ne fonctionne pas de la même manière, et une même personne peut réagir différemment à différents moments. Pour certain.e.s, l’écriture pourra être un remède contre le stress ou la fatigue. Pour d’autres, cela rendra le processus créatif impossible. Parfois, il faut reconnaitre qu’on a besoin de souffler, ou selon une expression anglaise de « remplir le puits » de l’inspiration.

Il faut faire attention à ne pas en faire la solution par défaut, mais il faut aussi connaitre ses limites. Et oui, je suis consciente de l’ironie de cette déclaration quand j’écris cet article alors que je suis malade^^. Ce n’est pas parce que c’est nécessaire que c’est facile…

4 : Tout changer…

Pour l’instant, j’ai parlé de solutions assez faciles à mettre en place : mettre une scène de côté, faire des recherches, prendre des vacances (même si comme on l’a vu, la dernière n’est pas toujours si facile que ça^^). Ma proposition suivante est un peu plus douloureuse…

Comme je l’expliquais plus tôt, pour quelqu’un qui écrit chronologiquement, mon premier jet pour la Muse aphone comportait quand même pas mal de trous. En fait, je n’ai jamais vraiment eu de premier jet complet, le premier dans lequel il n’a manqué aucune scène était déjà très loin dans mon processus de révision.

La fin en particulier m’a posé beaucoup de problèmes. Je l’ai laissée de côté au départ, mais je voulais quand même écrire quelque chose, pour avoir un minimum l’impression d’avoir « terminé ». J’avais une idée pour ma fin, sauf que je n’arrivais pas à l’écrire. Refus d’obstacle pur et simple.

Au bout d’un moment, il a fallu que je me rende à l’évidence : si je n’arrivais pas à écrire la fin, c’est qu’elle ne fonctionnait tout simplement pas. C’était un mélange de « trop cliché », « pas logique » et « je n’arrive pas à voir comment ça pourrait se dérouler ». Donc j’ai jeté à la poubelle (c’est à dire dans un dossier séparé de Scrivener, toujours accessible…) ce que j’avais déjà écrit pour cette fin, et j’en ai écrit une autre. Et là bizarrement, plus de blocage (bon j’ai été obligée de la réécrire après mes retours de bêta-lecture, parce qu’elle ne marchait pas si bien que ça non plus, mais au moins j’avais eu quelque chose à présenter à mes bêta-lecteurices !).

Parfois, si vous bloquez, c’est simplement parce que vous sentez que quelque chose cloche.

Dans mon cas, c’est mon plan qui s’est avéré bancal, mais ça peut très bien être le point de vue qui n’est pas adapté, le moment ou le lieu ou vous écrivez, etc.

Parmi les tentatives que j’ai faites depuis ce printemps pour me remettre à l’écriture, abandonner un peu le clavier pour reprendre le stylo et le papier a été étrangement efficace (dans mon cas, je pense que le papier autorise à faire plus d’erreurs, surtout que je n’arrive pas à me relire^^, c’est plus simple pour passer en « écriture automatique »).

Si vous coincez, essayez de bousculer un peu vos habitudes et vous aurez peut-être une bonne surprise !

5 : Se recentrer

On arrive maintenant au conseil ultime, celui qui m’a le plus aidé sur mon dernier blocage, qui sévit chez moi depuis le début de l’année.

Au départ, il y avait surtout un mélange de fatigue et de stress dont il m’a fallu longtemps pour me débarrasser. Mais ensuite, je savais que j’étais reposée, et pourtant je n’arrivais toujours pas à écrire, ou seulement au compte-goutte (et ce n’était absolument pas un plaisir). Et j’ai essayé pas mal de choses, dans l’esprit de mon point précédent : j’ai basculé de la troisième à la première personne, du passé au présent, j’ai écrit sur papier, j’ai même envisagé de modifier mon roman pour passer de la fantasy au réalisme magique ou à l’urban fantasy. Ça m’a aidée, ponctuellement, mais pas réellement débloquée non plus. En fait, je n’arrivais pas à retrouver l’enthousiasme que j’avais pendant l’écriture de mon premier roman.

Et un jour j’ai fait un exercice intéressant : j’ai écrit ce qui me plaisait dans mon idée de second roman, pourquoi j’avais envie de l’écrire. C’est quelque chose dont j’avais déjà entendu parler, mais que je trouvais assez abstrait. Mais ça m’a doublement aidée : aider à voir ce qui était important dans mon roman, et aussi aidé à identifier ce qui ne me plaisait pas. A partir de ce moment-là, j’ai pu reprendre mon concept et le retravailler, en appuyant sur les idées qui me motivent particulièrement. Même si cela implique de jeter, pour la deuxième fois, une bonne partie de ce que j’avais écrit… La différence c’est que maintenant j’ai un concept qui m’enthousiasme vraiment et qui tient la route.

Ça ne veut pas dire que j’ai réglé tous mes problèmes miraculeusement : j’ai encore des difficultés à me remettre en mode « écriture » après avoir passé trop de temps en mode « révision ». Il y a aussi le fait que je me suis enfin autorisé à envisager la publication pour mon premier roman, ce qui me met une pression de « qualité » que je n’avais pas avant.

Mais finalement, je pense que c’est un outil assez efficace pour ne pas perdre de vue ce qui NOUS motive dans un projet, pour ne pas se retrouver à écrire des choses par automatisme. Dans mon cas par exemple, je n’aimais pas du tout le système religieux dans mon roman, un système monothéiste que je n’avais pas vraiment choisi mais mis là plutôt par réflexe. Quand je me suis rendue compte que je n’arrivais pas à l’écrire parce que je trouvais ça cliché et inintéressant, ça m’a poussée à trouver d’autres solutions qui au moins me paraissent infiniment plus excitantes.

Conclusion

Pour moi, toute la problématique du blocage est une question de diagnostic. Si vous êtes bloqué.e, ce n’est pas parce que la Muse vous a fui ou que vous êtes intrinsèquement mauvais.e.

Si vous êtes bloqué.e, c’est qu’il y a un caillou quelque part dans l’engrenage, et il faut le trouver. Parfois, c’est simplement un manque d’information, que des recherches, un peu de planification ou simplement d’attente, pourra régler facilement. Parfois, c’est un manque d’énergie et de bande passante disponible pour l’écriture. D’autre fois, c’est l’histoire qui coince, et il faut accepter de la modifier, parfois de revenir un peu en arrière pour prendre le bon chemin et contourner l’obstacle.

L’essentiel, c’est d’arriver à identifier la cause.

Je ne dis pas que c’est facile, sinon j’aurais fini d’écrire ce deuxième roman depuis longtemps^^. Il peut s’agir d’un ensemble de causes, et vous ne pouvez pas forcément agir sur toutes (il m’a fallu un an pour me sortir d’une situation professionnelle compliquée, et pourtant je suis dans un milieu très privilégié où les postes ne manquent pas).

L’essentiel, c’est de se souvenir que ce n’est pas vous le problème, et que vous allez le surmonter (oui oui, je l’écris pour moi aussi, un peu d’auto-persuasion ne fait de mal à personne^^).


Et vous, est-ce que vous vous êtes déjà retrouvé.e face à un blocage ? Comment avez-vous réussi à le vaincre ? Donnez-nous toutes vos astuces dans les commentaires ?

6 réflexions au sujet de “5 techniques pour vaincre un blocage d’écriture”

  1. Je vais garder ton article en favori car je crois que beaucoup d’auteurs auraient besoin de le lire 🙂
    Ton point 4, c’est exactement ce qui m’est arrivé avec le tome 2 de Météorites : il me restait 3 scènes à écrire et je n’ai jamais pu parce que ça allait complètement dans le mur. Du coup je vais tout réécrire. Mais ce sera beaucoup mieux.

    Et ton point 5 me fait plaisir car je travaillais justement ce matin sur le service d’accompagnement pour auteurs que je prépare, et la première question que j’ai prévu de poser c’est : « Qu’est-ce qui te motive dans ton histoire et pourquoi est-ce que tu tiens à l’écrire ? » 🙂

    1. Merci ! Je suis contente que cet article résonne^^. Oui, ta question est un excellent point de départ, je crois. Quand on essaie d’écrire un roman, c’est facile de se laisser emporter par la taille du projet, et de ne plus voir que les difficultés, la quantité de travail, tout ce qu’on n’aime pas. C’est important de se recentrer de temps en temps sur le côté positif.
      D’ailleurs, je pense que c’est aussi pour ça que je trouve la phase de correction aussi libératrice (en tout cas au début^^), c’est parce que c’est aussi un moment où on peut « faire le tri » et se recentrer sur ce qui fonctionne et ce qu’on aime dans son premier jet…

  2. Pour le moment, j’ai utilisé la technique 2, 3 et 4 ^^
    Merci pour cet article, ça m’a rassuré car c’est fou comme je me sens coupable lorsque je n’arrive pas à écrire. Après j’ai remarqué que moins j’écris, moins j’ai envie d’écrire… Bref, ce n’est pas simple.
    ça fait en tout cas plaisir de savoir que tu as retrouvé le goût de l’écriture et je te souhaite bien du courage pour ton deuxième roman 🙂

    1. Merci pour ton commentaire ! Je comprends la culpabilité, c’est un truc que j’essaie d’apprendre à gérer en ce moment. En dehors des blocages dont je parle dans l’article, j’ai aussi l’impression que je fonctionne par phase : je suis super motivée sur un sujet pour une période limitée de temps, et j’ai l’impression que ça ne me laisse pas beaucoup de bande passante pour le reste. Pour l’instant je lutte un peu contre ça, mais je me demande si ce n’est pas une erreur. Peut-être que je devrais effectivement m’autoriser à passer un mois à faire de la déco/rangement chez moi, sans culpabiliser, puis un mois à écrire, puis un mois à faire je ne sais quoi… Actuellement, j’ai l’impression de ne pas terminer un seul weekend sans culpabiliser : j’ai fait du bricolage, et du rangement et du sport mais je n’ai pas écrit ou j’ai écrit, mais je n’ai pas fait de sport, etc. C’est fatigant^^

      1. Je comprends tout à fait ^^
        Après, je sais que je suis plus « efficace » en écrivant un peu tout le temps que lors de grosses séances espacées, et au moins j’ai la satisfaction de voir avancer mon projet (ça me permet de garder le moral après des mois et des mois sur le même roman).
        Et quand vraiment mon projet me sort par les yeux, j’essaie d’écrire sous d’autres formats (poèmes, nouvelles, articles de blog…) pour « garder la main ».
        En ce moment, je teste une séance d’écriture une heure avant de commencer le boulot. C’est un des avantages du télétravail pour moi, de pouvoir mieux s’organiser à ce niveau là et de gagner du temps sur les heures de transports 😉
        Je ne sais si tu connais le podcast « Procrastination », mais un épisode était sur l’injonction à écrire tous les jours : https://lioneldavoust.com/2020/procrastination-podcast-s04e17-ecrire-tous-les-jours
        Peut-être des pistes pour ta problématique ?

        1. Non, je ne connaissais pas, je vais me pencher dessus, merci pour la suggestion !
          Pour un petit update, je participe à NaNoWriMo cette année (même si mon objectif n’est que d’écrire 30 heures dans le mois), et je suis super contente (voir même complètement euphorique) de mon avancée. Hier soir, j’ai écrit 1800 mots en 1h30, et après des mois et des mois de traversée du désert, c’est juste… magique^^
          Donc, oui, je pense que je peux vraiment dire que mon blocage est derrière moi !

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